Désiré Christian est surtout connu comme le collaborateur interprète d’Emile Gallé à Meisenthal. Il sera qualifié d’artiste-peintre dans la verrerie de Meisenthal, mais réalisera de véritables prouesses techniques et artistiques dans le monde de la verrerie française et européenne.
Évoluant sous l’influence de la production d’Emile Gallé et la production verrière de l’Ecole de Nancy, Christian Désiré (1846-1907) est un maître verrier incontesté.
Conservées au musée de Meisenthal, les œuvres de Christian Désiré ont des formes simples, inspirées par la nature, le japonisme, le style rocaille et l’orientalisme. Portrait d’un artiste complet…
Christian Désiré : sa vie, son œuvre
Désiré Jean-Baptiste Christian est né le 23 mai 1846 à Lemberg, en Moselle.
Fils de Jean-Baptiste Christian, garde forestier à Lemberg et aubergiste, et d’Odile Lutz, Désiré naît la même année qu’Emile Gallé.
Le couple Christian-Lutz aura neuf enfants, dont deux, Désiré et François, se lanceront dans le métier de la verrerie d’art. Désiré Christian épouse Julie Lena Hilt en 1873, et donnera naissance à Marie-Augustine et Armand, les futurs associés de Désiré dans leur atelier verrier familial dès 1899.
L’on ne sait si Désiré Christian a suivi des formations artistiques spécifiques, mais il écrivait et parlait le français correctement. À 14 ans, il est engagé comme apprenti dans l’atelier de décoration de la verrerie de Meisenthal.
Désiré Christian et Eugène Kremer se distinguent par leurs talents exceptionnels en tant qu’émailleurs et artistes décorateurs. Le père d’Emile Gallé (un des principaux fondateurs de l’Ecole de Nancy), Charles Gallé-Reinemer remarque son génie et son grand potentiel.
Dès 16 ans, il intègre les ateliers de Nicolas Matthieu Burgun, où il apprend les bases du métier de la décoration sur verre.
Devenu peintre émailleurpeintre-émailleur brillant, Désiré Christian devient rapidement responsable de l’atelier de décor de la société Burgun-Schverer.
Au début du XIXe siècle, le site verrier de Meisenthal produit des verriers de grande qualité, maintenant les techniques traditionnelles des anciennes usines du pays de Bitche. Les relations commerciales entre Charles Gallé-Reinemer et Nicolas Matthieu Burgun sont prospères vers l’année 1860.
Charles Gallé-Reinemer devient alors un des principaux fournisseurs de Burgun et, par la même occasion, ami proche de Nicolas Matthieu. Désiré Christian sera le principal interlocuteur des Gallé auprès de la verrerie de Meisenthal.
La guerre de 1870 complique considérablement les communications entre les deux ateliers, mais reprendra des plus belles après les hostilités entre la France et l’Allemagne.
À cette époque, Désiré Christian prend en charge le décor à l’émail commandé par l’atelier de Gallé à Nancy.
Le poste occupé par Christian au sein de l’atelier de Burgun lui permet de prendre des décisions importantes, et de développer son talent et sa dextérité. Ses activités se développent rapidement, il va gérer une équipe d’environ 7 personnes dans l’atelier de décoration de Meisenthal entre 1877-1878.
L’enseigne a établi un atelier complet dédié à la production de vases Gallé-Reinemer.
Les relations entre la société Burgun, l’atelier de Nancy, Schrerer et Compagnie et Désiré Christian qualifie ce dernier d’artiste peintre, mais Christian expérimente et met au point de nouvelles techniques d’émaillage, qui constitueront une véritable innovation dans le monde de la technique verrière et de l’art.
Les relations entre les ateliers de Meisenthal et de Nancy se dégradent, et Emile Gallé fonde sa cristallerie à Nancy, en collaboration avec Joseph Burgun le 29 mai 1894.
Après la mort de Nicolas Matthieu Burgun, l’atelier subit de nombreuses difficultés face aux occupants allemands, mais aussi en ce qui concerne la succession.
Le successeur de Nicolas Matthieu, Antoine Matthieu Burgun, maintient l’atelier de verrerie Art Nouveau, et désormais, la maison va porter le chardon et la croix de Lorraine.
Désiré Jean-Baptiste Christian maintiendra son poste de Responsable de fabrication des Verreries d’Art de Lorraine et de la société Burgun, Schverer & Cie jusqu’en 1896-1897.
L’art de Désiré Christian : l’émaillage
Les pièces produites par Désiré Christian ont généralement des formes simples, avec un décor à l’émail rehaussé d’or ou gravé à l’acide. L’émaillage consiste en l’application d’une couche d’émaux colorés sur une pièce en verre.
Souvent, le décor est finement appliqué au pinceau, et une deuxième cuisson est indispensable pour garantir la fixation du décor à l’émail.
Désiré Christian et l’influence de Gallé
Alors responsable de la direction artistique des ateliers de Charles Gallé-Reinemer, Emile Gallé remarque l’exceptionnel génie de Désiré Christian dès 1867. Ce dernier était à l’époque simple décorateur à l’émail auprès de la verrerie de Burgun.
Gallé va engager Désiré Christian à temps partiel dans son atelier de Meisenthal.
Christian va expérimenter et approfondir toutes les techniques de l’art du verre, et deviendra, avec Gallé, une des principales figures de la verrerie d’art en France.
Devenu fondateur de l’Ecole de Nancy, Emile Gallé nomme Désiré Christian responsable de l’atelier de décoration.
La manufacture de Meisenthal va bénéficier des prouesses techniques de Désiré Christian en matière de l’art du verre, dont la technique du verre coloré à deux couches, ou encore les essais de la marqueterie. Christian va être beaucoup influencé par les décors et les motifs imaginés par l’enseigne Gallé-Reinemer, dans toutes ses productions.
Tout comme les artistes partisans du mouvement Art Nouveau et de l’Ecole de Nancy comme les frères Daum, les frères Muller ou encore Emile Gallé, Désiré Christian produira beaucoup de décors floraux émaillés, des vases à décors mythologiques, des pièces multicouches…
L'atelier de verrerie d'art de Lorraine de Désiré Christian après Meisenthal
Désiré Christian excelle dans l’art de la décoration sur verre, maîtrisant tous les rouages des techniques telles que les inclusions métalliques, l’émaillage, la gravure à la roue, le décor floral en camée et à émail intercalaire…
Cette dernière est présentée en 1895 à Strasbourg par la Société Burgun, Schverer & Compagnie, et sera honorée d’une médaille d’or.
Fort de sa technicité et de son génie, Désiré Jean-Baptiste Christian décide de s'installer à son propre compte, et établit son propre atelier de verrerie entre 1898 et 1899. Il s’associe alors avec son frère François Christian, ses enfants Marie-Augustine et Armand, son beau-frère Joseph Schmitt, ainsi que d’autres artistes de renom.
Dénommé « Cristaux et céramiques d’art », son atelier est installé route de Soucht, à proximité de la verrerie de Meisenthal. Désiré Christian expose ses propres productions à Munich en 1899, et gagne une médaille d’argent à l’Exposition Universelle de 1900 ; ses collaborateurs obtiennent également une mention honorable.
Entre 1901 et 1906, il enchaîne les expositions à Saint-Pétersbourg, à Dresde, à Turin, à Munich, à Saint-Louis (Missouri, Etats-Unis, médaille d’or), à Metz et à Krefeld. Il y présente ses œuvres, mais aussi d’anciennes pièces de Gallé conçues à la manufacture de Meisenthal.
Le décor intercalaire par Désiré Christian
Si l’artiste émailleur Désiré Jean-Baptiste Christian a longtemps vécu dans l’ombre d’Emile Gallé, il a beaucoup apporté dans les techniques du verre, notamment la marqueterie de verre, l’émail intercalaire, l’application de fils de cristal, l’étirement à la pince à la chaud de verres multicouches, la gravure à la roue, ainsi que la cémentation à l’argent ou au cuivre.
Le décor intercalaire est réalisé en émaux polychromes intercalaires de différents coloris : vert, bleu, noir et lie de vin.
Désiré Christian meurt à Meisenthal le 19 janvier 1907, mais son nom restera associé à celui d’un maître verrier de talent, influencé par Gallé et l’Ecole de Nancy. Aujourd’hui encore, ses œuvres ont autant de valeur que celles de la cristallerie Baccarat, cristallerie Lalique ou encore celle de la cristallerie Saint-Louis.
Pour retrouver les œuvres de ce grand artiste, vous pouvez faire une visite du musée du verre de Meisenthal.
Pour en apprendre davantage sur Désiré Christian, vous pouvez consulter l'ouvrage de Philippe Olland, intitulé "Verrerie d'Art de Lorraine".